La pensée complotiste : un défi pour les scientifiques

L'argument convergent au service de la théorie du complot

Nous raisonnons très souvent à partir d'indices pour rechercher l'explication de certains faits troublants.

Par exemple, si le nouveau pot de pâte de chocolat est vide, je peux relier ce fait troublant avec d'autres faits : (1) mon petit garçon adore le chocolat, (2) il est rentré de l'école quand le pot était encore rempli, (3) il n'a pas faim à l'heure du dîner, (4) il a quelques traces de chocolat sur ses joues... Et il me dit qu'il n'a pas mangé de chocolat. Cependant, les nombreux indices que j'ai assemblés m'indiquent (5) qu'il a mangé la pâte de chocolat. J'ai raisonné selon la structure d'un argument convergent :

Au vu des indices (1-4), je tire la conclusion (5).

Cette structure de raisonnement est très classique, dans mille circonstances : pour mener une enquête policière, pour établir un diagnostic médical, pour expliquer la présence d'une tache d'humidité sur un mur, pour comprendre les raisons d'un échec aux examens...

Souvent, cette structure de raisonnement se révèle puissante pour nous permettre de découvrir une explication satisfaisante qui rende compte d'un fait ou de plusieurs faits troublants. Mais c'est aussi un type d'argument qui, par sa structure même, peut nous induire en erreur. En effet, même si tous les indices présents dans les prémisses d'un argument convergent sont vrais, il reste possible que sa conclusion soit fausse. Dans notre précédent exemple, il est possible que mon petit garçon dise vrai, et qu'il n'ait donc pas mangé de chocolat, ou qu'il en ait mangé un petit peu seulement (et que ce soit son frère ou sa mère qui ait mangé l'essentiel ou la totalité de la pâte).

Par cet exemple, nous voyons qu'il est possible de construire un argument convergent qui conduise à la conclusion qui nous semble la plus évidente. Il en est de même dans d'innombrables situations.

L'argumentation complotiste repose souvent sur cette structure argumentative qui est à la fois très populaire, très utile... et potentiellement fausse. C'est pourquoi il importe de porter un regard critique sur ce type d'argument convergent. Cependant, comme nous l'explique Emmanuelle Danblon, il serait illusoire de penser que le discours complotiste peut être repéré par des indices linguistiques ou argumentatifs simples.

Existe-t-il des arguments complotistes ? Par Emmanuelle Danblon, Université de Bruxelles
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