La pensée complotiste : un défi pour les scientifiques

Le problème de la valeur de la preuve dans la pensée conspirationniste

Le problème de la preuve est essentiel dans toute recherche de la vérité, ou dans toute recherche pour construire une représentation la plus fidèle possible d'une situation problématique. A la lecture des argumentations complotistes, il apparaît que certains biais sont fréquents pour cette recherche de la vérité.

Le complotisme : une accumulation d'indices qui vaudrait comme une preuve définitive

La rhétorique du complot est une rhétorique de l'accumulation de ces indices, comme nous l'avons vu plus haut en discutant l'argument convergent. Cette rhétorique semble s'intégrer dans la pensée humaine presque naturellement car nous sommes amenés à procéder de la sorte pour résoudre de nombreux problèmes. Pensons ici au médecin lors d'un diagnostic, au policier dans son enquête ou au scientifique qui veut valider une hypothèse.

Du côté des complotistes, les négationnistes de l'alunissage, qui affirment que l'homme n'a jamais marché sur la lune, fournissent de très nombreux indices troublants dont l'accumulation doit emporter (selon eux) la conviction du public.

Le complotisme : une confusion entre le fait, l'indice et la preuve

Les faits, qui ne sont autre chose que des représentations de ce qui existe réellement, deviennent des indices lorsqu'ils peuvent être interprétés de façon favorable à la thèse du complot, et ils sont désignés ensuite comme autant de preuves de l'existence d'un complot. Par exemple, un repas entre deux opposants politiques dans l'arrière-salle d'un restaurant pourra être considéré comme l'indice, voire la preuve d'une entente cachée entre ces deux personnes qui se présentent comme des opposants.

ExempleExemple imaginaire (mais pas irréaliste...)

A l'époque de l'Union soviétique, trois prisonniers discutent dans un camp de redressement. Le premier raconte : "j'arrivais toujours en avance à mon travail. J'ai alors été condamné pour espionnage". Le second raconte : "J'arrivais toujours en retard à mon travail. J'ai alors été condamné pour sabotage". Le troisième raconte alors : "J'arrivais toujours à l'heure à mon travail. J'ai alors été condamné pour conformisme petit-bourgeois".

Les faits deviennent vite des indices puis des preuves...

Le complotisme : un renversement de la charge de la preuve

Le renversement de la charge de la preuve est un élément fréquent de l'argumentaire complotiste. Il consiste à exiger des responsables présumés du complot de se justifier, de prouver qu'ils n'ont pas comploté. Les réticences éventuelles à se justifier sont ensuite le plus souvent interprétées comme autant de preuves supplémentaires de l'existence d'un complot.

Il s'agit bien d'un renversement de la charge de la preuve car celle-ci devrait incomber aux auteurs de l'accusation de complot.

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