L'argument par analogie

L'argument par comparaison

Si l'argumentation par analogie suppose une analogie de structure, l'argumentation par comparaison met en regard deux entités isolées. Elle rapproche deux termes par le biais d'un outil de comparaison explicite : « comme », « semblable à... ».

Voici une présentation abstraite de la forme de l'argument par comparaison :

A ressemble à B parce qu'ils ont C, D, ... Z en commun.

Par exemple : "Tu es bien comme ta mère ! Tu ne reconnaîtras jamais que tu peux avoir tort".

Comme l'analogie proportionnelle, la comparaison peut être une manière commode de caractériser un objet ou une notion en le rapprochant ou en le distinguant d'autres objets. Au lieu de considérer l'objet en soi, on choisit un objet comparable, plus simple ou plus connu, pour le définir (ou l'évaluer) par approximation.

Ainsi, en avril 2003, dans un article intitulé « Prélude au choc des civilisations » et faisant suite à une déclaration de Georges Bush, qui espérait que le succès militaire américain en Irak allait accélérer le processus de démocratisation des pays voisins, le journaliste Mezri Haddad écrivait :

« Parce qu'ils n'ont pas de mémoire historique, à l'inverse des Européens, les Américains ne se rendent pas encore compte que le remède qu'ils préconisent est infiniment plus nocif que le mal qu'ils prétendent combattre. Tels les sauvages de Louisiane décrits par Montesquieu, qui, pour récolter les fruits mûrs d'un arbre n'hésitaient pas à l'abattre car c'est plus commode et plus rapide, les stratèges en antichambre ne réalisent pas que leur scénario paradisiaque pourrait tourner à l'apocalypse. » (Libération, 15 avril 2003, rubrique « Rebonds », p.10)

La comparaison entre l'attitude des Américains en Irak et celle des sauvages de Louisiane vise à faire passer une évaluation du comportement depuis le phore vers le thème. Elle est paraphrasable par : « c'est une attitude à court terme qui peut oblitérer sérieusement le long terme ».

Notons ici une propriété importante des comparaisons : il peut y avoir « contagion » de certains traits secondaires du phore sur le thème. Ainsi, dans notre exemple, la comparaison des Américains avec des « sauvages » n'est pas innocente en termes axiologiques. Les traits négatifs attribués aux sauvages sont ici transportés sur les Américains. Notons aussi l'évocation de Montesquieu. L'image de l'auteur de l'argument en sort renforcée car il apparaît comme un homme cultivé.

ExempleComparer la mort des abeilles et celle des êtres humains

L'insecticide Gaucho a été interdit dans les grandes cultures alimentaires parce qu'il était toxique pour les abeilles. Dans les débats autour de cette interdiction, des scientifiques ont argué que cette décision ne se justifiait pas car la toxicité du Gaucho n'était pas établie scientifiquement. L'un des arguments les plus utilisés en faveur de cette thèse affirmait que la cause des mortalités des abeilles ne pouvait être imputée au Gaucho car cette mortalité s'observait également dans des zones dans lesquelles il n'était pas utilisé.

Voici l'argument de Maxim & van der Sluijs (2013)[1]

« Les pertes d'abeilles dues au Gaucho ne sont pas contradictoires avec des pertes d'abeilles qui auraient d'autres causes telles que la maladie ou les manques alimentaires. Il en va ainsi pour les être humains. Ils peuvent mourir de nombreuses causes telles que les accidents de voiture, les maladies ou le cancer. Ce n'est en rien un argument pour ne pas essayer de limiter les accidents ou traiter le cancer. De nombreux facteurs influencent la mortalité des abeilles. Ce n'est pas une raison pour ne pas s'occuper de la toxicité du Gaucho »

Ces deux auteurs proposent une analogie entre les situations des abeilles victimes d'une mortalité trop importante et les humains victimes du cancer. Dans les deux situations, il existe une similarité qui concerne la multiplicité des causes possibles pour rendre compte du problème sanitaire.

  1. Maxim, Laura et van der Sluijs, Jeroen (2013)

    Maxim, Laura et van der Sluijs, Jeroen (2013) Seed-dressing systemic insecticides and honeybees. Late lessons from early warnings: science, precaution, innovation. European Environment Agency

PrécédentPrécédentSuivantSuivant
AccueilAccueilImprimerImprimer Université de La Rochelle Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Partage des Conditions Initiales à l'IdentiqueRéalisé avec Scenari (nouvelle fenêtre)