Conclusion
Le CP donne à voir... ce que l'énonciateur veut montrer de la thèse qu'il défend et de lui-même. Nous savons d'emblée que l'image que l'on montre peut être fort éloignée de la réalité. Un CP peut masquer des aspects essentiels de la personnalité de son énonciateur, ses intérêts inavoués, ses conflits d'intérêt, les conceptions philosophiques qu'il défend, sans en avoir toujours clairement conscience. Comme la partie émergée d'un iceberg, le CP ne laisse apparaître qu'une toute petite partie de ce qu'est réellement son énonciateur et ce qu'il défend.
Pourtant, à y regarder de plus près, comme nous venons de le faire, le CP dévoile aussi, pour qui sait y faire, des éléments peu visibles et cependant intéressants de la stratégie argumentative de son énonciateur.
Nos analyses ont mis en évidence l'image de l'énonciateur et des autres intervenants de la controverse qui se construit à la lecture critique du CP. Elles ont ainsi montré que cette image constitue souvent un élément essentiel de l'argumentaire. Dans une controverse, on cherche à convaincre autant par la valeur de son argumentaire que par la valeur de celui qui l'a produit, ou par la dénonciation des défauts des arguments de l'adversaire.
Nos analyses ont aussi mis en évidence l'importance des émotions véhiculées par les titres, les sous-titres, les phrases-choc, mais aussi par les termes choisis pour nommer l'insecticide ou pour traiter de la santé des abeilles. Le poids de l'émotion et de l'image des intervenants peut étonner celui qui s'imagine qu'une controverse sur un sujet scientifique se traite par le poids des arguments scientifiques.
Dans la controverse sociale, la science n'est qu'un élément parmi d'autres, tels que les projets politiques, éthiques, environnementaux ou sanitaires. Mais cet élément montre ici sa force ; les parties prenantes de la controverse s'entendent toutes pour donner à la science sa confiance pour faire éclater la vérité sur la toxicité des insecticides pour les abeilles.