Les imaginaires socio-discursifs
L'imaginaire tel qu'il est compris en analyse du discours peut être qualifié de socio-discursif dans la mesure où on fait l'hypothèse que le symptôme d'un imaginaire est la parole. En effet, celui-ci résulte de l'activité de représentation qui construit des univers de pensée, lieux d'institution de vérités, et cette construction se fait par le biais de la sédimentation de discours narratifs et argumentatifs proposant une description et une explication des phénomènes du monde et des comportements humains.
L'imaginaire se construit ainsi des systèmes de pensée cohérents à partir de types de savoir qui sont investis, tantôt, de pathos (le savoir comme affect), d'ethos (le savoir comme image de soi), de logos (le savoir comme argument rationnel). Ainsi, les imaginaires sont engendrés par les discours qui circulent dans les groupes sociaux, s'organisant en systèmes de pensée cohérents créateurs de valeurs, jouant le rôle de justification de l'action sociale et se déposant dans la mémoire collective ( P. Charaudeau, 2007[1]).
Ces discours créateurs d'imaginaires se produisent dans un domaine de pratique sociale déterminé qui joue un rôle de filtre axiologique. Cela permet de comprendre qu'un même imaginaire puisse recevoir une valeur positive ou négative selon le domaine de pratique dans lequel il s'inscrit. Ainsi, l'imaginaire de Tradition sera marqué de façon positive dans le domaine de la pratique religieuse et parfois dans celui de la politique, alors qu'il sera marqué négativement dans les domaines économique ou technologique. Évidemment, il s'agit ici de la valeur intrinsèque accordée à l'imaginaire et non point de la façon dont il est utilisé. Autres exemples : l'imaginaire du « droit à la liberté » a pu justifier des engagements dans la résistance durant la deuxième guerre mondiale, mais c'est l'imaginaire de « pureté du peuple » qui a été source dans l'histoire d'exactions, de massacres et de génocides.