Les prémisses doivent être acceptables (critère A)
L'idéal d'un argument qui serait fondé sur des prémisses que l'on sait vraies est plutôt rare. En effet, nous argumentons le plus souvent en situation d'incertitude, en situation dans laquelle notre méconnaissance des faits et des savoirs théoriques ne nous permet pas de désigner ce qui est vrai. C'est pourquoi le premier critère pour évaluer des prémisses n'est pas leur vérité, mais, plus modestement, leur acceptabilité.
On parle de prémisses acceptables, pour dire qu'elles ont au moins l'une des qualités suivantes.
Soit les prémisses sont vraies. Il arrive (heureusement) que l'on puisse s'en assurer.
Soit les prémisses sont vraisemblables. Cet attribut ne doit pas être compris comme « semblable à la vérité », comme le serait un roman imaginaire qui créerait une illusion de réalité. Il signifie plutôt « qui est à bon droit considéré comme vrai (...) » (Robert).
Soit les prémisses proviennent d'une source compétente. Si mon quotidien du soir préféré m'informe qu'une série d'attentats ont eu lieu récemment en Irak, je penserai qu'il y a bien eu une série d'attentats récemment en Irak.
Soit les prémisses proviennent d'un témoignage d'une personne de confiance.
Soit les prémisses sont plausibles en ce qu'elles correspondent à ce que nous connaissons de la situation et qu'elles ne sont pas démenties par d'autres données dont nous disposons. Ce critère d'acceptabilité nous montre que nous sommes parfois en situation d'admettre des prémisses avec une très mauvaise visibilité sur la situation. Nous acceptons certaines prémisses faute de mieux. Certains responsables politiques disent parfois qu'ils ne prennent que de mauvaises décisions car ils se trouvent dans ce type de situation, et que leur talent consiste à prendre... la moins mauvaise décision.
Exemple : Un exemple de prémisse inacceptable : la décrédibilisation de l'adversaire
Il arrive assez souvent que l'on prête une intention, un projet, une thèse à un adversaire qui ne s'y reconnaît pas. Par exemple, on fera croire qu'un banquier défendra toujours des idées de droite, qu'un syndicaliste sera nostalgique de l'Union soviétique, qu'un Juif sera nécessairement d'accord avec la politique du gouvernement israélien, qu'un musulman défendra la politique de l'Iran. Dans des discussions mouvementées, la grossièreté de tels clichés passe parfois inaperçue. En d'autres termes, il arrive qu'un intervenant d'une controverse construise une image de son adversaire telle qu'elle lui convient. Une telle image est inacceptable en ce qu'elle ne correspond pas à la personne visée.
Complément : Questions critiques concernant le critère A
D'après (Govier, 2010: 128-135)[1]
QC1. La prémisse est-elle vraie ?
QC2. La prémisse est-elle classiquement acceptée par des personnes ou des institutions compétentes ?
QC3. La prémisse est-elle la conclusion d'un argument solide ?
QC4. La prémisse a-t-elle été énoncée par une source qui fait autorité ?
QC5. La prémisse a-t-elle été énoncée par un témoin digne de confiance ?